Suprématie

L’homme. Cette espèce si insignifiante et qui a fait tant de ravages. Cette créature si petite qui a soumis, éradiqué tant d’autres espèces. Comment avons-nous pu nous faire avoir nous aussi ?

Nous étions là bien avant, dominant les cieux et la terre. Notre puissance était sans égale. Nos longues vies nous apportaient l’expérience, la sagesse, et ce sont ces dernières qui nous ont permis de régner si longtemps. Jusqu’à ce que ces étranges choses apparaissent. Trop petites pour qu’on leur accorde de l’importance, elles se sont vite avérées curieuses et gênantes. S’introduisant dans nos aires, parvenant parfois à voler nos richesses, nos œufs, nous les dévorions en retour, détruisions leurs abris de notre feu en représailles. Mais il faut croire que ce n’était pas suffisant. Nous qui nous pensions sages, nous les avons sous-estimés.

Durant des siècles, des millénaires de guerre, ces êtres ridicules faisaient toujours plus de victimes dans nos rangs. Oh, eux aussi mouraient. Pourtant, il en revenait toujours, plus déterminés que jamais, adoptant à chaque fois de nouvelles techniques, s’adaptant. Si minuscules… ils nous dépassaient par leur créativité qui évoluait sans cesse. Peu à peu, ils nous ont amenés au bord de l’extinction. Nous étions contraints de nous cacher pour survivre, dans les profondeurs des montagnes, au cœur de l’immensité des forêts qui s’amenuisaient, abattues par ces cruautés sans scrupule.

Quand ils furent persuadés que nous n’existions plus, ils changèrent de cibles. Toujours plus puissants, toujours plus craints, rien ne résistait à leur domination destructrice. Nous, rares survivants, ne pouvions qu’assister en silence, ravalant notre fierté, notre arrogance qui avaient fini par causer notre perte, à cette terrible suprématie de l’Homme.

Lorsqu’il n’eut plus rien à asservir, à détruire, il se tourna vers ses propres semblables. Le monde ne fut plus qu’esclavage et guerres fratricides. Il engendra d’étranges entités mécaniques pour servir ces tristes desseins. Mais les ayant créées à son image, elles avaient les mêmes défauts que lui. Si sûr de lui, si sûr de sa domination, de sa puissance, si fier de sa position, de sa création, s’identifiant à un dieu invincible, il resta aveugle aux nombreux signes. Les machines prirent le contrôle, détruisirent tout avec une puissance que même les hommes n’avaient jamais osé utiliser, et des hommes, il ne resta plus rien.

Pas même les machines.

Depuis nos refuges sous terre, nous avons été très inquiets par le silence soudain. Puis nous avons compris et sommes sortis. Notre calvaire était terminé. C’était le retour de la suprématie des dragons.

Image Pixabay (thommas68)

Pour rappel, je suis l’autrice de ce texte et donc: article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle (CPI) « l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial »

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